Il y a des rencontres qui changent le cours d’une vie. Celle entre Alain Delon et Daniel Broussin en fait indéniablement partie. Pendant 24 ans, cet ancien officier de sécurité a été l’ombre du monstre sacré du cinéma français, veillant sur lui jour et nuit, partageant ses moments de gloire comme ses instants de doute. Aujourd’hui, Daniel Broussin brise le silence et lève le voile sur cette collaboration hors du commun.
Dans une interview exclusive accordée au Parisien le 22 septembre 2024, l’ancien garde du corps d’Alain Delon dévoile des anecdotes surprenantes qui dressent le portrait d’un homme complexe, exigeant, parfois colérique, mais aussi profondément humain. Ce témoignage inédit nous plonge dans l’intimité d’une légende vivante du 7e art, révélant les facettes méconnues de sa personnalité.
Une rencontre sous le signe du destin
C’est en 1993 que les chemins de Daniel Broussin et d’Alain Delon se croisent pour la première fois. L’ancien officier de sécurité de François Mitterrand est alors recommandé par Christian Prouteau, directeur du GIGN et du GSPR, pour devenir le garde du corps de l’acteur. Une opportunité que Broussin saisit sans hésiter, marquant le début d’une collaboration qui durera près d’un quart de siècle.
Dès les premiers jours, un lien particulier se tisse entre les deux hommes. « J’ai un esprit très militaire et lui aussi. On aimait la rigueur, les horaires, donc ça se passait bien », se remémore Daniel Broussin. Cette affinité pour la discipline et l’ordre sera le ciment de leur relation professionnelle, mais aussi le terreau de moments parfois tendus.
Dans l’ombre du Guépard : les exigences d’une star
Au fil des années, Daniel Broussin découvre les multiples facettes de la personnalité d’Alain Delon. L’acteur, connu pour son charisme et son talent indéniable, se révèle être un patron exigeant, capable de passer de la colère à la complicité en un instant. Lors de leurs sorties, Delon ne manque jamais de rappeler à son garde du corps : « Qu’on ne me fasse pas chier ! » Une directive que Broussin interprète comme une injonction à être omniprésent et à faire barrage pour protéger son employeur des importuns.
Cette dynamique particulière se manifeste parfois de manière inattendue. Broussin raconte notamment un incident lors d’un gala en Allemagne, où Delon devait dîner avec Catherine Deneuve. Au dernier moment, l’acteur ordonne à son garde du corps de s’asseoir à ses côtés, reléguant ainsi la célèbre actrice à une autre table. Un geste qui illustre à la fois le pouvoir de Delon et la place privilégiée qu’occupait Broussin dans son entourage.
Ce surnom fait référence au film « Le Guépard » de Luchino Visconti, sorti en 1963, dans lequel Alain Delon tient l’un de ses rôles les plus marquants. Cette œuvre a contribué à forger l’image d’élégance et de charisme de l’acteur, devenant indissociable de sa carrière.
Les coulisses mouvementées des tournages
Les plateaux de cinéma sont également le théâtre de moments intenses entre Alain Delon et son entourage. Daniel Broussin se souvient particulièrement du tournage d’Astérix aux Jeux Olympiques, où l’acteur peine à supporter les demandes répétitives de Benoît Poelvoorde pour refaire les prises. L’exaspération atteint son paroxysme lorsque Delon, à bout de patience, quitte brusquement le plateau.
C’est grâce à l’intervention de son fidèle garde du corps que la situation finit par se débloquer. Sur les conseils de Broussin, Delon revient sur le plateau, apaisé, par respect pour le guépard et son dresseur présents sur le tournage. Cet épisode illustre non seulement le tempérament volcanique de l’acteur, mais aussi l’importance du rôle de médiateur que jouait Daniel Broussin dans ces moments de tension.
Des anecdotes qui en disent long
Au fil de son témoignage, Daniel Broussin dévoile des aspects méconnus de la personnalité d’Alain Delon. L’acteur, décrit comme paranoïaque, ne se déplace jamais sans un pistolet chargé. Cette révélation jette une lumière nouvelle sur le sentiment d’insécurité qui habite la star, malgré sa notoriété et la présence constante de son garde du corps.
L’ancien officier de sécurité raconte également une anecdote rocambolesque qui témoigne de la confiance absolue que lui accordait Delon. Un matin, les deux hommes réussissent à passer les portiques d’un aéroport avec des billets de 500 euros cachés dans leurs sous-vêtements. « Delon avait été invité à Nice par des Russes, qui l’avaient payé 30 000 euros en liquide. Au moment de prendre l’avion, je lui ai dit : On met 10 000 euros chacun dans notre slip et on repartit le reste entre nos poches et nos sacs », révèle Broussin, illustrant les situations parfois limites auxquelles il était confronté.
La paranoïa se caractérise par une méfiance exagérée envers les autres et un sentiment de persécution. Chez les personnalités publiques comme Alain Delon, ce trouble peut être exacerbé par la pression médiatique et les menaces réelles ou perçues liées à leur notoriété.
Entre rigueur et excès : la vie aux côtés du Samouraï
Durant ces 24 années de collaboration, Daniel Broussin a dû souvent franchir les limites de la légalité pour répondre aux exigences de son employeur. Ces révélations soulèvent des questions éthiques sur le rôle d’un garde du corps et les compromis parfois nécessaires dans ce métier si particulier. Elles témoignent également de la loyauté indéfectible de Broussin envers Alain Delon, malgré les situations parfois délicates.
À travers ce témoignage sans fard, Daniel Broussin nous offre un aperçu fascinant de la personnalité complexe d’Alain Delon. Entre les anecdotes rocambolesques et les moments d’intensité, il dresse le portrait d’un homme charismatique mais exigeant, hanté par ses démons mais profondément humain. Ce récit inédit permet de mieux comprendre les contradictions qui font d’Alain Delon une figure incontournable du cinéma français, admirée autant que controversée.