La Bretagne rurale comme personnage à part entière
Le village fictif d’Anaon, filmé dans une Bretagne authentique loin des cartes postales, devient le troisième protagoniste de la série. David Hourrègue capte les landes sauvages, les criques rocheuses et les hameaux isolés avec une lumière crépusculaire qui amplifie le mystère. Ces choix visuels, rappelant True Detective (saison 1), transforment les mégalithes en présages et les forêts en pièges vivants.
Contrairement aux séries fantastiques surfant sur Brocéliande, Anaon puise son réalisme dans les détails triviaux : murets de pierres croulants, maisons aux volets clos, et commerces déserts. Le vent omniprésent et les brumes maritimes créent une oppression organique, miroir des non-dits familiaux. Cette incarnation physique du décor atteint son apogée lors des scènes nocturnes, où le Bugul-noz surgit sans effets numériques tapageurs, épousant les reliefs naturels du paysage.
Plus qu’une série fantastique : une méditation sur le deuil
Anaon utilise le prisme horrifique pour disséquer les mécanismes du chagrin. La lutte contre le Bugul-noz se double d’un combat intime : Max et Wendie affrontent l’absence de la mère/épouse, dont les fantômes ressurgissent dans des flashbacks poignants. Ces séquences, teintées de regrets et de secrets enfouis, évoquent Les Revenants par leur traitement visceral du trauma.
La série excelle dans l’art des non-dits : gestes inachevés, conversations interrompues et regards évocateurs dépeignent une famille fracturée. Les scènes où Wendie tente désespérément de connecter avec son père, tandis que ce dernier s’engloutit dans son enquête, rappellent Sharp Objects. Le final ouvert, laissant des plaies béantes, promet une saison 2 axée sur la reconstruction – si le monstre le permet.