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Justin P., 15 ans : son manifeste « L’action immunitaire » et ses références nazies

Julie K.
7 Min de lecture

Un manifeste de 13 pages, des références à Brueghel et des obsessions nazies : comment un adolescent de 15 ans a planifié l’attaque au couteau de Nantes. Alors que Justin P. reste hospitalisé pour dépression, son étrange document « L’action immunitaire » et ses déclarations sur le 11-Septembre interrogent sur les racines de son passage à l’acte. Entre crise psychiatrique et idéologie radicale, l’enquête révèle des contradictions troublantes chez ce lycéen décrit comme « pas normal » par ses proches. Voici ce que le dossier médical et les témoignages dévoilent sur son discernement.

Le profil psychiatrique de Justin P. : dépression et hospitalisation d’urgence

Justin P. se trouve toujours hospitalisé après qu’un examen psychiatrique a conclu à l’incompatibilité de son état de santé avec la garde à vue. « Le psychiatre […] a conclu à l’incompatibilité de son état de santé avec la mesure de garde à vue en cours », précise le procureur de Nantes, Antoine Leroy. Cette décision judiciaire fait suite à l’attaque du jeudi 25 avril, où le lycéen de 15 ans a poignardé mortellement une camarade avant de blesser trois autres élèves.

L’acte s’est déroulé en plein jour au sein du collège-lycée privé Notre-Dame de Toutes-Aides. Parmi les victimes, une jeune fille a succombé à ses blessures, tandis qu’un autre élève restait « entre la vie et la mort » dans la soirée, selon les informations du parquet. Les forces de l’ordre ont interpellé Justin P. peu après les faits, sans qu’il n’oppose de résistance.

Son dossier médical révèle des antécédents dépressifs connus, mais la gravité soudaine de son passage à l’acte interroge. Le Parisien rapporte d’ailleurs qu’il aurait demandé aux policiers de lui « tirer une balle dans la tête » lors de son arrestation. Ces éléments alimentent désormais le débat sur le degré de responsabilité pénale du suspect, qui fera l’objet d’une expertise psychiatrique approfondie.

« L’action immunitaire » : le manifeste aux références artistiques et écologistes troublantes

Quelques heures avant les coups de couteau, Justin P. adresse aux élèves un courriel de 13 pages intitulé « L’action immunitaire ». Ce texte confus mêle critique de la mondialisation, apologie d’une « révolte biologique » et références culturelles inattendues. « Pourquoi continuer à vivre soumis à un système qui détruit notre essence même ? », interroge-t-il, comparant l’humanité à une « machine à décomposer l’humain ».

Au cœur du document, une analyse énigmatique du Misanthrope de Brueghel l’Ancien (1568) sert de métaphore à sa pensée. Justin P. y voit un appel à « lutter, crier, résister » contre un monde perçu comme piège, écrivant : « La seule solution, ce serait peut-être d’agir, de refuser, de saboter ». Une formule glaçante introduit pourtant le texte : « ce document ne justifie aucun acte », laissant planer le doute sur une préméditation déguisée en réflexion philosophique.

Les enquêteurs étudient minutieusement chaque paragraphe de ce manifeste, où se croisent écologie radicale et nihilisme. La notion d’« équilibre naturel, même cruel » à rétablir contre un « écocide globalisé » constitue aujourd’hui une pièce centrale du dossier.

Nazisme et 11-Septembre : les obsessions dérangeantes du lycéen

Plusieurs témoignages dessinent le portrait d’un adolescent fasciné par les idéologies extrêmes. « Il disait qu’il adorait Hitler », rapporte une collégienne à l’AFP. Un ancien camarade de classe confirme au Figaro : « Il partageait des idées nazies. Il rigolait de ça, mais pas tant que ça ». Ces provocations s’étendaient au djihadisme, selon un ami interrogé par BFMTV.

La veille de l’attaque, Justin P. envoie des messages d’adieu troublants sur Snapchat à un proche : « Longue vie à toi », « Prends soin de ta famille ». Ces phrases, a posteriori interprétées comme des signes précurseurs, s’accompagnent d’une fascination pour le 11-Septembre. « Ça a l’air incroyable de détourner un avion. De conduire un avion sans savoir le conduire… », déclarait-il selon un témoin.

Ces éléments, combinés à des tendances suicidaires rapportées par Le Parisien, interrogent sur une possible radicalisation plurielle. Le lycéen de 15 ans semble avoir puisé dans des références contradictoires – nazisme, écologie radicale, terrorisme – pour construire un discours incohérent mais violent.

La question centrale du discernement : enjeux judiciaires à venir

La demande de Justin P. aux policiers lors de son interpellation – « tirez une balle dans ma tête » – cristallise le paradoxe de l’affaire. Ce comportement suicidaire, couplé à son hospitalisation d’office, complique l’évaluation de sa responsabilité pénale. Les experts devront déterminer si ses troubles psychiatriques ont altéré sa capacité de jugement lors de l’attaque.

Le code pénal français prévoit que l’altération du discernement au moment des faits peut entraîner une relaxe ou une atténuation de peine. Or, le manifeste préalable et les adieux sur Snapchat suggèrent une certaine préméditation. « La justice devra trancher si son discernement était plein et entier lors de la tuerie », rappelle l’article source.

Cette expertise psychiatrique déterminante interroge aussi sur la prise en charge antérieure du lycéen. Ses déclarations publiques sur Hitler ou le 11-Septembre, bien que connues de son entourage, n’avaient pas déclenché de signalement spécifique. Le dossier soulève désormais une question cruciale : comment un adolescent suivi pour dépression a-t-il pu passer à l’acte sans alerter les dispositifs de prévention ?