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Même squattée, la piscine peut coûter cher à son propriétaire : la jurisprudence qui inquiète

La Responsabilité Juridique Inversée Du Propriétaire

Si la gravité des accidents liés aux piscines squattées interpelle, la question centrale demeure celle de la responsabilité juridique engagée. En effet, la loi civile impose au propriétaire une obligation stricte en matière de sécurité, indépendamment du caractère illégal de l’intrusion. Cette inversion apparente des rôles s’explique par la volonté du législateur de protéger toute personne victime d’un dommage, même lorsqu’elle se trouve sur une propriété privée sans autorisation.

Me Fabien Gaillard, avocat en droit immobilier, résume clairement cette position : « Les propriétaires doivent répondre du dommage causé, même si celui-ci concerne un intrus ». Cette responsabilité découle notamment de l’article 1242 du Code civil, qui impose au détenteur d’une chose de répondre des dommages causés par cette chose. Ainsi, le propriétaire d’une piscine doit démontrer qu’il a pris toutes les mesures nécessaires pour prévenir les risques : installation d’une clôture conforme, mise en place d’une alarme, ou encore usage de dispositifs de surveillance adaptés.

En cas de manquement, la faute de négligence peut être retenue, exposant le propriétaire à des condamnations civiles assorties de dommages et intérêts. Cette exigence pèse d’autant plus que la sanction pénale prévue contre l’intrus reste rarement appliquée. Le Code pénal prévoit pourtant jusqu’à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende pour toute personne pénétrant illégalement dans un domicile privé, mais cette répression s’avère marginale dans la pratique judiciaire. La jurisprudence privilégie ainsi la protection de la victime, même lorsqu’elle est un squatteur.

Cette situation paradoxale met en lumière une tension entre deux volets du droit : le droit pénal, qui sanctionne l’intrusion, et le droit civil, qui protège la victime d’un dommage. Le propriétaire, confronté à cette dualité, doit donc anticiper les risques en veillant à la conformité de ses installations. La preuve de cette conformité lui revient, sans quoi sa responsabilité civile sera engagée, indépendamment de la faute de l’intrus.

Dans ce contexte, la question n’est plus seulement celle de la légitimité de l’accès illégal, mais bien celle de la prévention des accidents. Cette inversion de responsabilité encourage une vigilance accrue des propriétaires et copropriétés, qui doivent désormais considérer la sécurité comme une priorité juridique autant que matérielle. Ce cadre contraignant influence directement les décisions prises pour limiter les risques, tant humains que financiers.

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