Un rapport qui pourrait faire trembler les retraités glissé dans les mains du Premier ministre. La Cour des comptes ose une piste explosive pour réformer les pensions, pendant que le gouvernement botte en touche. Derrière les 66 milliards d’écart avec l’Europe se cache un mécanisme redoutable – et la ministre du Travail lâche juste : « Ça mérite d’être posé… »
La Cour des comptes souffle un vent froid sur les retraites
Un rapport de la Cour des comptes remis en catimini à François Bayrou secoue le système des retraites. Les Sages proposent ni plus ni moins de «remettre à plat» l’indexation sur l’inflation en vigueur depuis 1987. À la place ? Un mécanisme mixte calqué sur les salaires et le ratio retraités/actifs, comme le suggère Pierre Moscovici : *«Cette indexation sur l’inflation n’apparaît pas nécessairement la mieux adaptée…»*
La ministre du Travail Catherine Vautrin botte en touche avec prudence : *«Ça fait partie des questions qui méritent d’être posées»*, se contente-t-elle de glisser. Pourtant, ce n’est pas la première alerte : le gouvernement Barnier avait déjà tenté une sous-indexation en 2025, avant de reculer sous la pression.
Derrière ces tergiversations se profile une réalité implacable : les pensions augmentent plus vite que les salaires depuis 2023. Une bombe à retardement pour les comptes publics que la Cour des comptes s’emploie à désamorcer – quitte à froisser 16 millions de retraités.
66 milliards d’écart avec l’Europe : le chiffre qui accuse
La France dépense 13,5% de son PIB pour les retraites, contre 11% en moyenne dans la zone euro. Un écart qui se chiffre à 66 milliards d’euros en 2022 – et bondit à 118 milliards face à l’Allemagne. *«La moitié de ce surcoût vient de paramètres de notre système»,* analyse Pierre Moscovici, pointant des pensions plus généreuses et un départ plus précoce que chez nos voisins.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le niveau de vie des retraités français atteint 99,8% de celui des actifs, contre seulement 87,8% outre-Rhin. Une singularité qui pèse lourd dans les comptes publics. *«Comparé à l’Allemagne, notre système crée un déséquilibre structurel»,* martèle le rapport, rappelant que cet écart représente «4,5 points de PIB» de dépenses supplémentaires.
Cette surenchère sociale a un prix. Chaque année, l’Hexagone consacre l’équivalent de 4 000 euros par habitant aux retraites, contre 3 200 euros en moyenne européenne. Un fossé qui explique en partie les réticences de Bercy à maintenir le statu quo face au vieillissement démographique.
Salaires vs inflation : la bombe à retardement des pensions
Le paradoxe est brutal : en 2024, les retraites ont bondi de 5,3% contre seulement 4,1% pour les salaires. Un écart qui se réduit à peine en 2025 (+2,2% vs +2,6%), selon les chiffres officiels. «La forte inflation a inversé la tendance historique», analyse la Cour des comptes, alors que les salaires dépassaient habituellement les prix.
Pour Pierre Moscovici, la solution réside dans un double indexage : «Une part liée aux salaires et une autre au ratio retraités/actifs». Ce mécanisme impliquerait que chaque nouvelle augmentation du nombre de pensionnés grève automatiquement les futures revalorisations. *«C’est une question de justice intergénérationnelle»,* justifie-t-il, arguant que ce système «exposerait actifs et retraités aux mêmes aléas».
Un calcul redoutable qui transformerait la démographie en épée de Damoclès. Avec un ratio retraités/actifs en hausse constante, le décrochage des pensions deviendrait… mathématique.
Le piège du « facteur de soutenabilité » pour les retraités
Le rapport introduit une bombe à fragmentation générationnelle : le « facteur de soutenabilité ». Ce mécanisme technique lie directement les revalorisations de pensions au ratio retraités/actifs. Plus ce dernier augmente, plus les retraites décrochent des salaires. *« Un ajustement automatique qui greverait les futures pensions »,* résume sobrement le document.
Derrière cette formule aride se cache une mission officieuse : fournir aux partenaires sociaux des arguments chiffrés pour réformer le système de 2023. La Cour des comptes évite soigneusement de pointer du doigt, mais son constat est sans appel : « L’indexation actuelle ne garantit pas l’équilibre à long terme ».
Les experts redoutent surtout un effet ciseaux : avec 800 000 nouveaux retraités par an et une natalité en berne, le ratio ne peut que se dégrader. Résultat ? Les pensions augmenteraient mécaniquement moins vite que les salaires… qui eux-mêmes peinent à suivre l’inflation. Un cercle vicieux que la Cour présente pourtant comme une « solidarité intergénérationnelle ».