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Robert Ménard relance un texte abandonné depuis 2013 pour suspendre les allocations familiales…

Julie K.
6 Min de lecture

Robert Ménard relance un débat explosif sur la responsabilité parentale en s’inspirant d’une loi abandonnée depuis dix ans. Le maire de Béziers évoque désormais la suspension des allocations familiales pour les parents d’enfants non scolarisés, prolongeant sa politique controversée de couvre-feu pour mineurs. Derrière cette proposition se cache un dispositif testé sous Sarkozy, dont l’efficacité réelle avait pourtant été mise en doute. Une mesure qui ravive les tensions entre approche coercitive et protection de l’enfance, alors que les chiffres historiques soulèvent des questions inattendues.

Robert Ménard durcit le ton contre l’absentéisme scolaire

Le maire de Béziers propose une mesure choc : suspendre les allocations familiales des parents dont les enfants ne sont pas scolarisés. Cette initiative s’inscrit dans la continuité de son couvre-feu instauré en 2024 pour les mineurs de moins de 13 ans non accompagnés, marquant une nouvelle escalade dans sa politique sécuritaire et éducative.

Défendant sa position sur RMC, l’édile proche de l’extrême droite fustige : « Ils vont rater leur vie à cause de leurs parents qui sont, pour certains, tout simplement irresponsables ». Un discours qui place la responsabilité parentale au cœur du débat, tout en occultant les causes socio-économiques de l’absentéisme.

Pour mettre en œuvre cette politique, la mairie prévoit un croisement des données entre les listes de la CAF et les inscriptions scolaires. Robert Ménard assure disposer d’un suivi quotidien : « On fait le point de l’absentéisme dans les collèges et les écoles tous les jours, donc on a des chiffres ». Une méthode qui soulève déjà des questions sur le respect de la vie privée des familles concernées.

Le précédent de la loi Ciotti et son bilan contrasté

La proposition de Robert Ménard renoue avec un dispositif abandonné en 2013 : la loi Ciotti de 2010, portée sous Nicolas Sarkozy par l’actuel allié du RN. Ce texte prévoyait déjà la suspension des allocations familiales après quatre demi-journées d’absence non justifiées en un mois, suivie d’un contrat de « responsabilité parentale » en cas de récidive.

Pourtant, les chiffres officiels révèlent un impact limité : seules 472 familles ont été concernées entre février 2011 et mars 2012, selon Public Sénat. Paradoxalement, les données de la DEPP montrent une augmentation de l’absentéisme pendant cette période (+0,3% au collège et +0,5% au lycée professionnel en 2010-2011).

Le mécanisme complexe – impliquant signalements académiques et suspensions réversibles – explique peut-être cette faible application. Une subtilité que semble ignorer Robert Ménard, alors que le texte original précisait : « Les allocations dont le versement avait été suspendu pouvaient alors être rétroactivement reversées ».

Le dispositif technique envisagé à Béziers

La mairie mise sur un contrôle systématique pour appliquer sa mesure : le croisement des listes de la CAF recensant les enfants de moins de 16 ans bénéficiaires d’allocations avec les fichiers d’inscription scolaire. Cette méthode permettrait d’identifier « ceux qui ne sont pas inscrits dans des établissements », selon Robert Ménard.

L’édile insiste sur le suivi quotidien : « On fait le point de l’absentéisme dans les collèges et les écoles tous les jours », précisant disposer de chiffres actualisés. Un mécanisme qui transforme les établissements scolaires en relais administratifs, chaque absence devenant un signal potentiel déclenchant des sanctions financières.

Le projet prévoit cependant aucun détail opérationnel sur la marge d’erreur acceptable entre les deux bases de données, ni sur les recours possibles pour les familles. Seule certitude avancée : la suspension des allocations interviendrait après simple comparaison des listes, sans mention d’un accompagnement préalable des parents.

Polémiques et enjeux sous-jacents

La proposition de Robert Ménard ravive un débat clivant sur l’équilibre entre sanction et accompagnement. Face aux critiques, le maire de Béziers justifie sa mesure par « les enfants d’abord », estimant que cette politique protégerait leur avenir. Un argument qui masque mal les tensions entre approche sociale et logique répressive.

Le contexte politique n’est pas neutre : Éric Ciotti, initiateur de la loi de 2010, a depuis rejoint les rangs du Rassemblement national. Ce rapprochement idéologique alimente les suspicions d’une instrumentalisation de la question éducative à des fins électoralistes, malgré les dénégations de l’édile béziérais.

Les détracteurs pointent un paradoxe : comment protéger les enfants en privant les familles vulnérables de ressources vitales ? Aucune étude ne corrobore l’efficacité de cette méthode, alors que l’expérience Ciotti a montré une augmentation parallèle de l’absentéisme. Le débat dépasse ainsi la simple gestion scolaire pour interroger les priorités sociétales.