Toto le sanglier domestiqué échappera-t-il à l’abattoir ?

Vladimir P.
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Dans le Pas-de-Calais, une affaire hors du commun secoue l’opinion publique. Un jeune sanglier domestique nommé Toto, recueilli par une famille bienveillante, se retrouve au cœur d’une bataille juridique et émotionnelle. Son destin, suspendu à une décision de justice, soulève des questions sur notre rapport aux animaux sauvages et les limites de la domestication.

Alors que le tribunal judiciaire d’Arras a ordonné l’euthanasie de Toto pour des raisons sanitaires, une vague de soutien sans précédent se mobilise pour sauver sa vie. Des citoyens ordinaires aux personnalités politiques, tous unissent leurs voix pour plaider la cause de ce marcassin devenu mascotte malgré lui. Un pourvoi en cassation, ultime recours devant la plus haute juridiction, vient d’être lancé dans l’espoir de renverser le jugement initial.

Un sauvetage qui tourne au casse-tête juridique

L’histoire de Toto commence à l’automne 2023, lorsqu’une famille compatissante du Pas-de-Calais recueille un jeune marcassin rescapé d’une partie de chasse. Rapidement adopté et choyé, l’animal devient un membre à part entière du foyer. Cependant, cette cohabitation harmonieuse se heurte bientôt à la réalité juridique : la détention d’un animal sauvage sans certificat de capacité est formellement interdite par la loi.

La situation bascule le jour où les gendarmes interviennent au domicile familial. Toto est alors saisi et placé dans un refuge à Saint-Laurent-Blangy, près d’Arras. Son propriétaire, chez qui on découvre également une cinquantaine d’armes selon La Voix du Nord, se voit convoqué devant la justice pour janvier 2025, accusé de détention illégale d’animal sauvage.

Une sentence contestée

Le vendredi suivant, le couperet tombe : la cour d’appel de Douai ordonne l’euthanasie de Toto. Cette décision s’appuie sur un test révélant que le jeune sanglier est porteur de la maladie porcine d’Aujeszky, une affection virale apparentée à la rage, contagieuse et potentiellement mortelle pour les animaux, bien qu’inoffensive pour l’homme. Cette sentence, perçue comme drastique par de nombreux observateurs, déclenche une vague d’indignation et de mobilisation.

Face à cette situation, les soutiens se multiplient. Une pétition en ligne recueille rapidement des milliers de signatures. La famille de Toto affirme avoir reçu l’appui d’un sénateur et d’une députée, démontrant l’ampleur nationale que prend l’affaire. Mais le soutien le plus inattendu vient peut-être de Boris Ravignon, maire de Charleville-Mézières, qui propose d’accueillir Toto dans un parc animalier de sa ville, promettant même d’aménager un enclos individuel pour respecter les contraintes sanitaires.

Un précédent qui ravive l’espoir

Cette affaire n’est pas sans rappeler un cas similaire qui avait défrayé la chronique à Arras il y a vingt-cinq ans. À l’époque, une famille risquait également de perdre une femelle sanglier apprivoisée, menacée d’euthanasie par la justice. L’issue favorable de cette affaire passée ravive l’espoir des défenseurs de Toto.

Dans ce cas précédent, la famille avait finalement obtenu le droit de garder l’animal grâce à un test ADN. Celui-ci avait révélé que la laie était en réalité une « sanglochonne », un hybride entre le sanglier et le cochon domestique. Cette découverte avait mis en lumière un vide juridique concernant le statut de ces animaux hybrides, permettant ainsi à la famille de conserver leur compagnon à quatre pattes.

Une bataille juridique et éthique

Aujourd’hui, les défenseurs de Toto espèrent que le pourvoi en cassation permettra de sauver la vie du jeune sanglier. Cette procédure, qui porte l’affaire devant la plus haute juridiction française, représente l’ultime chance de renverser la décision d’euthanasie. L’avocat de la famille, contacté ce mardi, n’a pas confirmé si le pourvoi avait effectivement été déposé, laissant planer le suspense sur l’avenir de Toto.

Cette affaire soulève des questions fondamentales sur notre relation aux animaux sauvages, les limites de la domestication et l’équilibre entre protection de la santé publique et considérations éthiques. Alors que le débat fait rage, le sort de Toto reste en suspens, symbole malgré lui des complexités de notre coexistence avec la faune sauvage.