Dans le Jura, la route RD38E1 ferme chaque nuit du 12 mars au 11 avril 2025, de 18h à 6h, pour un motif étonnant : protéger des milliers de crapauds, grenouilles et tritons lors de leur migration reproductive. « Une maternité naturelle à préserver à tout prix », justifient les autorités, évoquant les deux étangs vitaux situés de part et d’autre de ce tronçon stratégique. Un itinéraire de déviation a été aménagé pour éviter l’hécatombe annuelle sur cette portion, tandis que scientifiques et écologistes saluent une initiative rare en France.
Une décision radicale pour protéger les amphibiens
Depuis le 12 mars 2025, la route départementale RD38E1, reliant Vincent-Froideville à Commenailles dans le Jura, est fermée chaque nuit de 18h à 6h. Objectif : protéger la migration annuelle de milliers de crapauds, grenouilles, tritons et salamandres vers leurs zones de reproduction. Ce tronçon, coincé entre deux étangs classés « zones humides majeures », sert de couloir vital pour ces espèces, dont la survie est menacée par le trafic routier.
La préfecture justifie cette mesure inédite jusqu’au 11 avril par le rôle écologique crucial de ces batraciens. « Ces étangs sont des maternités naturelles », explique un responsable, soulignant que chaque écrasement perturbe la chaîne alimentaire et fragilise des populations déjà en déclin. Un itinéraire de déviation a été activé, mais les autorités rappellent : « Priorité à la biodiversité, même si ça dérange ».
« Éviter un carnage » : le macabre constat derrière la fermeture
Selon la Fédération Départementale des Chasseurs du Jura, « sans cette fermeture nocturne, des centaines de batraciens seraient écrasés chaque nuit » sur ce tronçon de 500 mètres. Un chiffre qui s’inscrit dans un bilan européen alarmant : la mortalité routière est l’une des premières causes de disparition des amphibiens, dont les populations ont chuté de 50 % en vingt ans. « On parle d’espèces cruciales pour réguler les moustiques ou les limaces », rappelle un membre de la FDCJ.
Les écrasements massifs perturbent aussi la chaîne alimentaire, privant hérons ou hérissons de ressources. « En 2024, on a compté moins de 200 salamandres dans la zone, contre 800 il y a dix ans », déplore un naturaliste local. Un déclin directement lié au trafic, selon les experts, qui qualifient ces routes de « pièges écologiques » pour des animaux lentement adaptés à l’asphalte.
Détourner les voitures pour sauver des grenouilles : comment ça marche ?
Pour contourner la RD38E1 fermée, un itinéraire de déviation de 4 kilomètres a été balisé via les communes de Bréry et Picarreau. « Le trajet rallonge de 7 minutes en moyenne, mais c’est le prix à payer pour éviter l’hécatombe », explique la préfecture. Des panneaux lumineux et des agents informent les conducteurs depuis le 1er mars, tandis que les mairies concernées relaient l’info via leurs réseaux sociaux.
La fermeture est strictement appliquée : caméras mobiles et patrouilles surveillent le tronçon de nuit. « Les contrevenants risquent 135 euros d’amende », prévient la gendarmerie. Un dispositif renforcé le week-end, période où les migrations atteignent leur pic. « Même une voiture par heure peut tuer des dizaines d’amphibiens », insiste un responsable de la FDCJ, rappelant la lenteur des animaux.
*La suite de l’article sur la page suivante*