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Gérald Darmanin face aux magistrats : Ce qu’ils ne voulaient pas que vous sachiez sur l’expulsion des détenus étrangers…

Julie K.
7 Min de lecture

Gérald Darmanin provoque la colère des magistrats avec sa nouvelle circulaire sur l’expulsion des détenus étrangers. Alors que le ministre de la Justice présente cette mesure comme une solution pour « désengorger les prisons », les professionnels du droit dénoncent un coup de communication. Entre procédures irréalistes et priorités contestables, le projet bute sur une réalité implacable : sur 19 000 détenus étrangers, moins de 3 000 pourraient être concernés. « Inentendable », lance le Syndicat de la Magistrature, révélant une logique qui sacrifie la dangerosité des criminels… au profit de leur nationalité.

La circulaire de Gérald Darmanin qui relance le débat sur les prisons

Gérald Darmanin envoie une circulaire samedi soir aux procureurs et directeurs de prisons, leur demandant d’« identifier les détenus étrangers expulsables ». Le ministre de la Justice justifie cette mesure par la nécessité de réduire la surpopulation carcérale, alors que 24,5 % des prisonniers en France sont de nationalité étrangère. Mais dès lundi, les magistrats dénoncent une « manœuvre politique », soulignant que les procédures d’expulsion existent déjà… et peinent à s’appliquer.

Parmi les 19 000 détenus étrangers, seuls 3 000 pourraient être concernés, selon les estimations de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). La raison ? 8 000 sont originaires d’Afrique, où les expulsions nécessitent un laissez-passer consulaire quasi impossible à obtenir. « Prioriser la nationalité plutôt que la dangerosité, c’est peu réaliste », assène Justine Probst, du Syndicat de la Magistrature, pointant une logique « incohérente » pour les professionnels de terrain.

« Inentendable » : La charge violente des juges contre la méthode Darmanin

Le Syndicat de la Magistrature qualifie la circulaire de « choquante et incohérente », dénonçant une logique qui sacrifie la dangerosité des criminels au profit de leur nationalité. Justine Probst, secrétaire nationale du syndicat, fustige : « On préfère expulser un voleur de pommes plutôt que de traiter le dossier d’un grand criminel ». Pour les magistrats, cette priorisation menace l’équité judiciaire et détourne les ressources déjà limitées.

Les critiques s’appuient sur un constat glaçant : selon les règles en vigueur, les expulsions ne peuvent concerner que les détenus originaires de l’UE… à condition que la France accepte en échange ses propres ressortissants incarcérés à l’étranger. « C’est un jeu de dupes administratif », résume une magistrate sous anonymat, soulignant que les dossiers complexes resteront de toute façon en souffrance, faute de moyens humains.

Le piège juridique que Darmanin a (volontairement ?) ignoré

Expulser un détenu hors de l’Union européenne exige son accord écrit et une « convention bilatérale » avec son pays d’origine, rappelle Didier Leschi, directeur de l’OFII. Or, sur les 8 000 détenus africains, la plupart ne disposent pas de laissez-passer consulaire, indispensable pour un rapatriement. « Sans coopération des États, ces expulsions relèvent de l’illusion », tranche un avocat spécialisé.

Les conventions nécessaires sont « rares et fragiles », surtout avec des pays en tension diplomatique avec la France, comme le Mali ou l’Algérie. La circulaire de Darmanin « ne modifie en rien ces règles », insistent les magistrats, qui y voient un simple rappel des procédures existantes. « Ça ressemble à une tentative de faire oublier l’absence de véritables solutions », lâche un procureur, exaspéré par le manque de moyens structurels.