Trois ans après la mort de Nahel, sa mère Mounia rompt un long silence lors d’un entretien exclusif. « Je vis avec son absence comme une plaie ouverte », confie-t-elle, tout en évoquant le projet de loi portant son nom actuellement en préparation. Entre douleur persistante et espoir législatif, ce texte controversé cristallise les débits sur les violences policières tout en peinant à apaiser un deuil maternel « bloqué dans le temps ».
Mounia, entre douleur et militantisme : la genèse d’un combat législatif
Depuis juillet 2023, chaque matin de Mounia commence par le même rituel : allumer une bougie devant la photo de Nahel dans leur ancien appartement de Nanterre. « Son sourire me donne la force d’avancer, même quand tout semble vide », révèle-t-elle à Buzzday. Proches et voisins décrivent une femme transformée, passant des nuits à compiler des dossiers juridiques après son service d’aide à domicile.
C’est lors d’une marche silencieuse organisée par le collectif Vérité pour Nahel que l’idée d’une loi a germé. Avril 2024 : sa rencontre avec trois députés marque un tournant. « J’ai listé chaque faille du système ce jour-là. Leur silence m’a convaincue qu’il fallait un texte contraignant », se souvient-elle. Le futur projet prévoit notamment un observatoire indépendant des contrôles policiers, directement inspiré par ses carnets manuscrits.
Les trois piliers de la « loi Nahel » : un cadre juridique inédit contre les dérives policières
Caméras piétons activées en permanence, formations obligatoires annuelles et « cellules de vigilance citoyenne » : le texte présenté en conseil des ministres ce jeudi structure sa réponse autour de mesures phares. L’article 5 prévoit notamment l’enregistrement systématique des interpellations en zone urbaine sensible, avec un accès direct aux images pour les enquêteurs internes.
La partie formation cristallise les débats, avec 140 heures annuelles dédiées à la gestion du stress et au profilage racial. « C’est une révolution culturelle pour les forces de l’ordre », analyse Me Yassine Bouzrou, avocat de la famille. Le troisième volet instaure un comité indépendant doté de pouvoirs de saisine directe du parquet, une première en droit français qui pourrait faire jurisprudence dans les affaires de violences institutionnelles.
Un texte qui divise : entre espoir associatif et frilosité politique
Le collectif Vérité pour Nahel et une trentaine d’associations signent ce jeudi une tribune commune saluant « une avancée majeure vers l’équité républicaine ». À l’inverse, plusieurs syndicats policiers dénoncent « des mesures inapplicables sur le terrain », selon les termes d’un communiqué de l’UNSA Police.
À l’Assemblée, les clivages suivent les lignes partisanes. La NUPES exige un élargissement du texte aux contrôles d’identité, quand Les Républicains jugent « prématuré de légiférer sous émotion ». Seule la voix des familles de victimes semble unanime : Adama Traoré, Théo Luhaka et d’autres ont annoncé leur soutien public à Mounia, lors d’une conférence de presre hier matin à Montreuil.
*La suite de l’article sur la page suivante*