Changement d’heure : chaque transition saisonnière malmène notre organisme, mais le Dr Armelle Rancillac, neuroscientifique à l’Inserm, révèle un risque méconnu pour le cerveau. Alors que 52% des Français redoutent la fatigue et l’irritabilité causées par ce décalage horaire, l’experte alerte sur l’impact invisible des perturbations chroniques du sommeil : l’accumulation de protéines toxiques liée aux maladies neurodégénératives. Entre conseils pratiques et explications biologiques, plongée dans un enjeu de santé publique qui dépasse la simple heure d’été.
Le Dr Armelle Rancillac sonne l’alarme
Neuroscientifique à l’Inserm et au Collège de France, le Dr Armelle Rancillac étudie depuis des années l’impact des rythmes circadiens sur la santé. Alors que le passage à l’heure d’été approche, elle met en garde contre un effet domino méconnu : les perturbations chroniques du sommeil favoriseraient l’accumulation de protéines toxiques dans le cerveau, liées à des maladies comme Alzheimer.
Ses recherches révèlent que le changement d’heure agit comme un « électrochoc » pour l’organisme. « Notre horloge interne régit les sécrétions hormonales, la digestion, la récupération cellulaire… Un décalage d’une heure suffit à désynchroniser ce mécanisme pendant plusieurs jours », explique-t-elle. Les premières victimes ? Les adolescents, les seniors et les travailleurs de nuit, déjà vulnérables aux troubles du sommeil.
Les 72 heures critiques après le changement d’heure
Fatigue persistante, somnolence diurne et baisse de vigilance marquent les premiers jours suivant le décalage horaire. Le Dr Rancillac explique ce phénomène par le désalignement entre l’heure sociale et l’horloge biologique : « Les fenêtres de sommeil réparateur ne correspondent plus à nos cycles hormonaux, ce qui réduit la qualité du repos ». Une perturbation qui se traduit aussi par des troubles digestifs et une faim déréglée chez 38% des personnes selon ses observations.
Ces effets varient selon les profils : les adolescents mettent jusqu’à 7 jours à récupérer un rythme normal, contre 3 jours en moyenne pour les adultes. « Chaque changement d’heure cumule des dettes de sommeil invisibles. Après 5 ans, le corps ne compense plus », avertit la neuroscientifique. Un constat qui alerte sur les risques à long terme pour les professions exposées comme les infirmiers ou les routiers.
Un lien inquiétant avec les maladies neurodégénératives
Le manque chronique de sommeil induit par les changements d’heure répétés aurait des conséquences insidieuses. « Pendant le sommeil profond, le système glymphatique nettoie le cerveau en évacuant les déchets comme les protéines bêta-amyloïdes », détaille le Dr Rancillac. Or ces protéines, lorsqu’elles s’accumulent, forment des plaques caractéristiques de la maladie d’Alzheimer.
Les études citées par la chercheure montrent que 5 changements d’heure successifs augmentent de 34% les marqueurs de neurodégénérescence chez les personnes prédisposées. « Ce n’est pas le décalage horaire qui cause Alzheimer, mais il agit comme un accélérateur chez ceux dont le cerveau est déjà fragilisé », tempère-t-elle. Un risque qui s’ajoute aux autres facteurs comme les troubles cardiovasculaires ou le diabète, également exacerbés par ces perturbations.